Dans les hôpitaux publics des médicaments périmés, médecins absents, et autres maux

Manque criant de personnel, carence en équipements, mauvais usage de médicaments... Dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes a relevé plusieurs dysfonctionnements au sein des hôpitaux publics du Royaume, de Tanger à Casablanca, en passant par Boujdour ou Sidi Slimane.

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Le ministre de la Santé, Anas Doukkali lors de la visite de l'hôpital de Tétouan en janvier 2019

Publié le 11 septembre, le rapport annuel de la Cour des comptes portant sur l’année 2018 dissèque la gestion des centres hospitaliers du Maroc. L’institution dirigée par Driss Jettou a mis à nu de nombreuses carences au niveau des institutions de santé du pays. Voici ce qu’il faut en retenir.

Hôpitaux sans réanimateurs

Dans une partie consacrée à l’absentéisme au sein de l’hôpital Mohammed VI de Tanger, la Cour des comptes relève qu’entre juin 2013 et septembre 2014 –soit 15 mois –, l’établissement ne disposait pas de réanimateur. Une situation qui “a empêché le recours à des interventions majeures”.

Durant toute cette période, le bloc opératoire a uniquement servi à la réalisation d’interventions dites “mineures” demandant des anesthésies locales. Les magistrats de la Cour des comptes ont relevé un problème similaire à l’hôpital de Boujdour où certains patients ont été transférés à l’hôpital régional de Laâyoune situé à… 200 kilomètres.

A Sidi Slimane, un chirurgien surexploité

Dans certains cas, le manque d’effectif pousse certains membres du personnel médical à dépasser leurs limites. C’est notamment le cas au centre hospitalier de Sidi Slimane où l’ensemble des interventions chirurgicales ont été réalisées par un seul médecin. Entre 2011 et 2014, ce dernier a réalisé une “moyenne annuelle de plus de 400 actes de chirurgie majeure et 283 actes de chirurgie mineure, face à une moyenne nationale d’intervention chirurgicale par médecin qui ne dépasse pas 174 selon les statistiques pour l’année 2014”.

Naissances sans suivi et médicaments périmés à Kelaat Sraghna

Dans le cadre d’un audit du centre hospitalier provincial de Kelaat Sraghna, la Cour des comptes a “constaté qu’au niveau de la suite de couche, la visite du pédiatre aux nouveau-nés n’est pas systématique, voire même rare”. Les  auteurs du rapport indiquent également que le médecin pédiatre n’ausculte pas les nouveau-nés au lendemain de leur naissance les exposant ainsi à des risques de complications non détectés à temps.

Le centre de santé a également vu se périmer des quantités importantes de produits pharmaceutiques. La perte de ces stocks est estimée à 4 millions de dirhams entre 2012 et 2016, soit 62% du budget alloué aux médicaments sur cette période.

Réveils douloureux à Mohammedia

Le centre hospitalier préfectoral Moulay Abdellah de Mohammedia n’échappe pas non plus aux critiques. Le rapport de la Cour des comptes, les magistrats de l’instance relèvent que l’unique bloc opératoire de l’établissement  ne dispose pas de salles de réveil”. Dans les faits les patients opérés se réveillent dans les couloirs ou dans la salle même où ils ont été opérés.

La Cour des comptes a relevé un autre dysfonctionnement au sein de cet établissement : les ambulances. En effet, la dotation annuelle en carburant pour les ambulances du centre ne dépasse pas les 15.000 dirhams annuels. Ces véhicules, qui ne sont pas médicalisés, ne servent pas seulement au transport des patients. Les ambulanciers font ainsi office de coursiers pour les besoins de l’établissement.

Mystérieux équipements à Sidi Slimane

Au Centre hospitalier provincial de Sidi Slimane, la Cour des comptes relève qu’un bon de commande de 132.000 dirhams a été établi pour la réparation d’un appareil. Pourtant, ce dernier “ne figure pas dans le registre d’inventaire et selon les déclarations du chargé du suivi des équipements et de leur maintenance, il n’est pas non plus au niveau du CHP”.

Squatteurs au centre hospitalier de Casablanca

Au niveau du centre hospitalier préfectoral Mohammed V de Casablanca, les auteurs du rapport ont constaté “l’occupation injustifiée et l’accumulation des arriérés des frais de consommation d’eau, d’électricité et de téléphone”.

Ils révèlent également  que “plusieurs responsables déchargés de leurs fonctions de responsabilité et qui n’exercent plus de fonctions au sein du CHP ni au sein de la délégation de la préfecture d’Ain Sebaâ- Hay Mohammadi  occupent toujours des logements de fonction”. L’ensemble de ces logements de fonction est branché gratuitement au compteur d’eau et d’électricité du CHP qui souffrait d’importants arriérés cumulés”.